Je suis convaincu que l’addiction est un faux problème, ou, plus exactement un problème mal posé.
Prenez un type comme Ludovic Lacay. S’il joue 15 heures par jours au poker et qu’il gagne 20.000 euros par mois, on appelle ça un pro. On est fier de lui et on est même un peu chauvin, un peu fan. Si, en revanche, c’est un anonyme qui gagne péniblement ses 200$, on le plaint, on dénonce son vice, on parle de « jeu abusif ». Vous voyez, le problème, ce n’est pas le temps de jeu, c’est l’argent. Dès qu’on en gagne, il n’y a plus de problème !
Mais bon, admettons que j’ai tort. Admettons qu’il existe un grand problème avec le jeu (vous m’avez rarement vu aussi conciliant, non ?). Dans ce cas, il faut faire appel à de vrais spécialistes, à des gens qui sachent vous comprendre, n’est-ce pas ? Eh bien là, on a un problème !
Un organisme est à notre service, il s’agit de l’Institut du Jeu Excessif. Son fondateur s’appelle Pierre Perret (ça ne s’invente pas !). Je ne sais pas s’il sait tout sur le zizi, mais côté poker, il a des lacunes. Comme toujours, il faut savoir lire entre les lignes, mais il affirme sans vergogne : « …tout joueur, et surtout celui du Net, surexposé aux risques à jouer, joue au bout du compte dans le seul but de… pouvoir rejouer ». Je ne vous cache pas que j’ai du mal à comprendre ce propos.
Mais il y a plus marrant : « au poker, trop de joueurs se persuadent qu’ils peuvent profiter d’un savoir-jouer ». Et si on lui proposait des petits heads-up à 1.000 euros contre ElkY pour voir si le « savoir-jouer » est une illusion ? Qu’en dites-vous ? Si on ouvrait la cage aux oiseaux, moi j’ai l’impression qu’on verrait sortir un gros pigeon.
Pierre Perret a également des réponses assez inattendues : « On sait par exemple que le Loto ou l’Euromillions ne posent aucun problème d’addiction ». Bah voyons ; mon grand-père y joue toutes les semaines depuis 40 ans, et avec ce qu’il a dépensé, il pourrait acheter le Phocéa. Avant que je perde autant que lui en jouant au poker…
Lorsqu’un joueur compulsif appelle le Docteur Perret, ce dernier a un moyen très efficace pour combattre l’addiction : il propose des séances de jeux de rôles. Oui, oui, vous avez bien lu. Le type qui appelle en disant : « Allo, bonjour, j’ai un problème avec le jeu », on lui répond : « Pas de panique, on va faire un petit jeu… ». Elle est bonne, non ?
Bien entendu, tout ceci est entièrement authentique.
Et, comme d’habitude le meilleur pour la fin : quand on lui demande ce qu’il faut faire pour lutter contre ce « mal ». Il propose que les opérateurs de jeu redistribuent moins d’argent aux joueurs. Autrement dit, il faut que les joueurs perdent plus. Bah, remarquez, c’est logique, s’ils n’ont plus une thune, d’une certaine façon, ils n’ont plus rien à perdre. Pas con.
Pour finir, Pierre Perret avoue que son institut a été fondé à la demande de… JOA Groupe. Qui fait quoi dans la vie ? Casinotier ! Pas mal. Ah bah du coup on comprend pourquoi il veut que les joueurs perdent plus !
Alors on se dit qu’on est tombé sur des charlots et qu’on va aller voir ailleurs. Et plutôt que de téléphoner, on va y aller directement, ce sera plus simple. Allons donc chez Adictel, un autre organisme censé régler les problèmes d’addictions.
Ils sont au 143 rue de Saussure à Paris. Tiens c’est marrant… c’est juste à côté du Groupe Partouche (au 141 bis) ! Pour un casinotier, le hasard fait toujours bien les choses.
Coïncidence ? Allons, ne soyez pas naïf. La bêtise, elle, est addictive.
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